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12/10/2009

achno news : Les certitudes et les zones d'ombre du procès Clearstream

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Il y a les impressions d'audience et il y a le droit. Contrairement à la cour d'assises où un faisceau d'indices peut suffire à déterminer une intime conviction, élaborée dans le secret absolu d'un délibéré, un tribunal correctionnel est tenu de motiver son jugement de condamnation ou de relaxe. Et donc de s'en tenir, pour chaque prévenu, à la qualification du délit pénal qui lui est reproché.


Une fois retombée la tension des confrontations, dissipée l'atmosphère enfiévrée de ces trois premières semaines d'audience, et avant que s'ouvre le temps des plaidoiries et du réquisitoire, que peut-on retenir de l'affaire Clearstream et de la mise en cause de Dominique de Villepin ? L'ancien premier ministre est renvoyé devant le tribunal correctionnel de Paris pour complicité de dénonciation calomnieuse, complicité d'usage de faux, recel d'abus de confiance et de vol. Les juges d'instruction, Jean-Marie d'Huy et Henri Pons, soutiennent que Dominique de Villepin a "donné instruction" à Jean-Louis Gergorin, dès avril 2004, de "saisir ou d'informer un juge" sur les fichiers Clearstream "alors qu'il avait connaissance de (leur) fausseté".
La connaissance, par M. de Villepin, de la "fausseté" des fichiers Clearstream. Juridiquement, c'est l'élément-clé du dossier et celui sur lequel l'accusation est la plus fragile. Le parquet en a conscience qui n'a pas suivi les juges d'instruction dans leur raisonnement en faveur d'une complicité "active" de M. de Villepin, dès avril 2004. Dans son réquisitoire écrit, le procureur de la République, Jean-Claude Marin, n'a retenu qu'une complicité "passive", en estimant que, par son inaction, M. de Villepin a "rendu possible" la poursuite des envois de fichiers falsifiés au juge Renaud Van Ruymbeke, en août et en octobre 2004.
Les trois premières semaines de débats n'ont apporté aucune preuve formelle à la thèse des juges d'instruction. Le général Philippe Rondot a indiqué avoir exprimé des doutes sérieux devant M. de Villepin en juillet, puis des certitudes sur la manipulation des fichiers en octobre. Reste la thèse de l'accusation : elle repose sur la volonté de dissimulation manifestée par M. de Villepin, dans une affaire susceptible de causer un préjudice à son adversaire politique, Nicolas Sarkozy.
La volonté de dissimulation de Dominique de Villepin. C'est le point sur lequel la défense de l'ancien premier ministre a été la plus dangereusement malmenée. Il ressort de l'audience que M. de Villepin a été beaucoup plus impliqué qu'il ne l'admet. Il y a, d'abord, les déclarations de Jean-Louis Gergorin, selon lesquelles il s'est entretenu à plusieurs reprises, au printemps 2004, de ce dossier avec M. de Villepin, alors ministre de l'intérieur. Les démentis apportés par ce dernier butent sur les témoignages des agents de sécurité de l'ancien numéro trois d'EADS, qui ont attesté des déplacements discrets de leur patron Place Beauvau, via une voiture du ministère de l'intérieur.
Il y a ensuite cet appel téléphonique passé par M. de Villepin au général Rondot le 25 mars 2004 pour faire libérer "la source " Imad Lahoud. L'ancien premier ministre a nié avoir évoqué lui-même ce sujet et accusé le général d'inventer cette version pour "se couvrir". Acculé par les fermes confirmations du général Rondot, il a tenté d'en limiter la portée en évoquant une "mauvaise interprétation" de ses propos, dont serait responsable... la piètre qualité de la communication téléphonique passée depuis sa voiture.
Il y a surtout le contenu des échanges rapportés par le général Philippe Rondot de ses deux réunions avec M. de Villepin. La première, le 9 janvier 2004, où le nom de M. Sarkozy aurait été cité à propos d'un "compte couplé" chez Clearstream et la seconde, le 19 juillet, au cours de laquelle M. de Villepin aurait manifesté sa crainte d'être mis en cause - "Si nous apparaissons, le PR et moi, nous sautons", note le général Rondot. Là encore, les dénégations ou les nuances opposées par l'ancien premier ministre sont apparues nettement moins convaincantes que les confirmations apportées à ses comptes rendus par le général Rondot. Dominique de Villepin aurait donc, à plusieurs reprises, menti. Cela crée un climat, mais pas encore une preuve de culpabilité.
Les mystères Jean-Louis Gergorin et Imad Lahoud. Sur eux repose la principale accusation de ce procès, la dénonciation calomnieuse. Dénonciateur, l'ancien numéro trois d'EADS l'admet, puisqu'il reconnaît avoir été le "corbeau" du juge Van Ruymbeke. Calomniateur, il le réfute, en assurant avoir cru jusqu'au bout à la véracité des fichiers. Imad Lahoud a, pour sa part, reconnu à l'audience n'avoir recopié qu'un seul nom - celui de M. Sarkozy, via les patronymes Nagy et Bocsa - "sur ordre", dit-il, de M. Gergorin. A braquer les projecteurs sur le conflit entre l'hyperprévenu et l'hyper-partie civile, ces deux-là échappent au regard. Le premier, par sa personnalité virevoltante, mélange complexe de folie et de fulgurance. Le second, par ses mystifications successives, hier trader poursuivi pour escroquerie, puis agent secret et hacker revendiqué du système Clearstream. Il a manipulé le journaliste Denis Robert, le général Rondot et Jean-Louis Gergorin, mentant sur tout et tout le temps et cherchant à apparaître aujourd'hui sous les traits passe-muraille d'un modeste professeur agrégé de mathématiques. Cela reste le mystère de cette affaire et, pour l'heure, sa frustration.

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